LES JOURS ET LES NUITS DU COSMOS – TROISIEME PARTIE – 1 – L’OEIL DU SOLEIL

TROISIEME PARTIE

LA GRANDE ANNEE

 

I

L’ŒIL DU SOLEIL

 

« L’orientation de l’activité mentale à partir d’Aristote a contribué pour une large part à émousser notre réceptivité à l’égard de la totalité des hiérophanies solaires. Que cette nouvelle orientation mentale n’abroge pas nécessairement la possibilité de l’expérience hiérophanique en elle-même, le cas de la Lune nous en fournit la preuve. Personne ne soutiendra, en effet, qu’un moderne est ipso facto imperméable aux hiérophanies lunaires[1]. »

Ces lignes de M. Eliade offrent une parfaite introduction à l’étude des mythes solaires, dont elles soulignent la difficulté. Mais Aristote n’y est pour rien[2]. C’est seulement que les symboles lunaires (cancériques) ou tauriques ou gémiques survivent encore à notre époque, fussent-ils « crépusculaires », alors que les mythes solaires sont morts, dans toute la force du terme.

Certes, le symbole essentiel du Signe, le Soleil lui-même, est encore honoré dans toute l’Afrique noire comme « fils de l’Etre Suprême » ou « époux de la déesse-lune ». Mais, dans la plupart des cas — chez les Bantous d’Afrique Orientale, notamment — il ne bénéficie plus d’un culte. De même, les Mundas du Bengale reconnaissent un dieu-soleil, Sing-boung, « qui ne s’immisce plus dans les affaires des hommes ». Il reçoit cependant des sacrifices de boucs blancs et de coqs.

Les Khonds de l’Orissa ont un dieu de la lumière, Bura (ou Bella) Pennu, « qui ne figure pas dans le culte ». Une autre peuplade du Bengale, les Oraou, lui donnent le nom de Dharmesh. Ici, le manque de confiance dans le dieu atteint au désespoir : « Nous avons tout tenté en vain ; mais toi, tu peux encore nous secourir ! » Les Oraou le supplient d’avoir pitié et de renaître, en lui sacrifiant un coq blanc.

Enfin, dans les archipels Leti, Sermata, Babar et Timorlant (à l’est de Timor), dans la pousse d’un figuier que les indigènes placent leur salut : « Le Figuier refleurit, crient-ils, O Grand Aïeul, Aïeul-Soleil, reviens ! Nous avons dépecé pour toi le porc, le bouc et la chèvre ! »

Nous pourrions multiplier de tels exemples : Eliade et Frazer en citent des centaines. Il suffira de noter que nulle part le dieu solaire n’est plus considéré comme réellement vivant. On honore en lui un souvenir, on reporte sur lui la nostalgie d’une absence effrayante de dieu ; ou bien on lui associe une compagne, déesse-lune ou déesse-terre, qui lui insuffle parfois certains pouvoirs[3].

Or, ce dieu mort aurait à notre époque au moins douze mille ans d’âge, puisque les plus anciens témoignages d’un culte solaire semblent être les vestiges découverts de part et d’autre du détroit de Béring (10 000 avant J.-C. ?)[4]. Les figures représentées y sont le mammouth et le rhinocéros, le renne, le cheval, le lion-tigre, le loup et le lynx. Cet art animalier se retrouve, postérieurement, dans le haut Obi et le haut Ienisseï, près du lac sibérien Baïkal, où il se combine avec l’art moustérien, très antérieur. Déjà paraissent dans ces vestiges quelques-uns des symboles solaires, qu’il nous faut étudier maintenant.

Les deux premiers en seraient le Fauve (l’ours ou le lion) et le Géant, comme le montrent les fouilles de Stepanoff à Fatian (1958), à Varakschi en Asie Centrale et à Khorézine dans l’actuel désert de Kizilkum.

Ces fouilles révèlent peu à peu l’existence de plusieurs « nations » dont l’existence jusqu’à nos jours était complètement ignorée. Les vestiges de Fatian (Fatianovo) remontent pour le moins au Ve millénaire ; à côté d’ossements et de figures d’oiseaux, qui doivent être rattachés au cycle gémique, s’y trouvent des tombeaux de chèvres (emblème « Capricorne » ?) et d’ours, considérés comme animaux sacrés. Tripol, sur le Dniepr, recèle des traces certaines du culte (et de la domestication) du cheval, antérieurement au IVe millénaire. Quant à Varakschi (plus récente : des chroniques chinoises du IXe siècle après J.-C. en font mention), c’était une ville somptueuse, où les fouilles exhument des fresques rouges décorées de figures de géants. Les traces d’un feu central dans une salle souterraine attestent qu’un dieu-lumière y était adoré. « La couleur rouge, la couleur feu, la couleur sang, dit l’ethnologue Chelov, devait être le symbole de la purification secrète[5]. »



[1] MIRCEA ELIADE, Traité d’Histoire des Religions.

[2] Sinon en cela que son enseignement reflète le passage d’une vision sacrée, archétypique du monde (PLATON) à une vision empirique, rationalisée (saisie de l’Univers en soi).

[3] Ou bien encore, comme le Narte Syrdon chez l’un des derniers peuples « solaires » du Caucase, les Ossètes, descendants des Scythes et des Alains, le dieu-lumière n’est plus qu’un bouffon, un esclave, que seules son ironie et son intelligence protègent des pires humiliations. (G. DUMEZIL, Loki, chapitre III, Maisonneuve, 1948).

[4] « Si les Celtes ont emprunté certains de leurs mythes à cette civilisation subarctique dont nous ne connaissons presque rien, on comprendrait comment il se fait que le cycle du Graal présente avec les mythes des Indiens des forêts de l’Amérique du Nord une parenté plus grande qu’avec n’importe quel autre système mythologique ». LEVI-STRAUSS, Tristes Tropiques.

[5] MERPERT et CHELOV, Les antiquités de notre sol, 1961.

 

Du Feu sacré au Dieu borgne

Dans les hiérophanies solaires, le Feu semble avoir eu dès l’origine une importance au moins égale à celle de la Pierre dans les hiérophanies lunaires. De même que l’ensevelissement à l’intérieur des bourgs, puis dans des galeries pierreuses ou sous des tumulus dédiés à des divinités lunaires caractérise le culte des morts dans les diverses religions cancériques, l’incinération confère un caractère commun aux diverses pratiques mortuaires des anciens peuples de l’Europe et de l’Asie Centrales. Plus tard, sous l’influence du syncrétisme Lion-Cancer naîtra la pratique des « urnes » de pierre où seront conservées les cendres des morts.

De tels « champs d’urnes » se retrouvent également au Laos et en Anatolie (où ils apparaissent vers le XVe siècle avant J.-C. (Troie VI), puis en Europe Centrale (Hongrie, Tumulus de Taszeg, niveau C). Enfin, vers 1000 ou 900, l’expansion de la civilisation des « champs d’urnes » atteignit la vallée du Pô et le Latium (Villanoviens), où les urnes, biconiques, sont recouvertes de coupelles ou de couvercles de bronze (influence taurique). Puis, de l’Italie, ces peuples (qui parlaient des langues celtiques) auraient pénétré en France, les uns traversant le Sud vers la Catalogne, les autres remontant, par la Trouée de Belfort, jusqu’en Alsace et en Franche-Comté. Au VIIe siècle avant J.-C., l’Angleterre du Sud fut atteinte[1].

Mais, avant que des peuples encore à demi nomades eussent essaimé ainsi dans le monde entier les cendres des morts encombrants, de grandes cités aux dieux solaires s’étaient implantées en Orient (à Suse et dans le delta de l’Indus). Selon nos tables de concordances leurs divinités devaient être celles d’une première mue du « lion », qu’il nous faudrait alors dater du VIe au IIIe millénaires avant J.-C., c’est-à-dire rendre contemporaine du culte d’Horus en Egypte préthinite. Considéré comme dieu solaire, Horus lui-même nous donnerait cet autre symbole du Signe : l’œil unique.

Junker a montré qu’Horus était primitivement un dieu du ciel, alors parfaitement anonyme[2]. Il ne prend en fait ce nom qu’après son identification avec le dieu-faucon (gémique), dont nous avons déjà parlé. Or, il est, avec cette forme, adoré dans certaines parties de l’Egypte (Létopolis) sous le nom de « Méhentiirty » : celui qui a deux yeux, ou de « Mékhenti-en-irty » : celui qui n’a plus d’yeux. Mais les Textes des Pyramides relatent l’histoire d’un dieu antérieur, Ré, le Maître des Dieux, caractérisé par son œil unique, et l’on pense qu’un premier Horus pourrait lui être identifié.

L’œil d’Horus (l’Oudjat) se reconnaît d’ailleurs dans de très nombreuses légendes égyptiennes, où il sert de prétexte aux luttes entre le fils d’Osiris et le dieu mauvais Seth. Dans un papyrus du Nouvel Empire, l’enjeu de la lutte, l’Oudjat, n’est plus l’œil d’Horus mais de Ré lui-même, devenu le père d’Horus et donc identifié à Osiris. Tous ces symboles solaires s’accompagnent rarement de la mention du Lion (absente de l’ancienne mythologie thinite). Seule, une légende récente, de » l’époque grecque, relate l’histoire de la déesse-lionne, fille du dieu-soleil, qu’un messager aurait été assez habile pour faire venir de Nubie en Egypte[3].



[1] En certaines parties de l’Amérique du Nord, au contraire, l’urne ne contient pas des cendres mais un corps reployé dans la forme du fœtus : vestige d’une tradition purement cancérique.

[2] JUNKER, Giza, II. — Il serait donc inexact de croire, comme on le prétend communément, que le Soleil fut le premier dieu de l’humanité. Ici encore, les ethnologues viennent confirmer les hypothèses de l’archéologie. Chez les Bantous d’Afrique Orientale, les Toradja d’Indonésie, les Munda du Bengale, le dieu-soleil a seulement pris la place d’un dieu antérieur (ouranien ou céleste) « dont il a poursuivi l’œuvre cosmogonique ». (PETTAZONI, Dio, Rome, 1922).

[3] JACQUES VANDIER, La religion égyptienne, Collection Mana, Presses Universitaires. — Mais un autre texte précise que la déesse-lionne s’était précédemment querellée avec Ré, et que cette querelle était la cause de son provisoire éloignement (ERMAN, Religion).

 

Du borgne au cheval

Egalement, l’œil unique du dieu solaire se retrouve en divers points du globe : dans l’Inde pré-aryenne et au Japon, ainsi qu’au front d’Odin, le dieu du Nord, et à celui du cyclope mythologique.

En ce qui concerne le panthéon de l’Inde antique, Sûrya, « l’œil du ciel » y serait le plus ancien des dieux, équivalent de l’égyptien Ré. Savitri lui était associé et quelquefois identifié : celui qui conduisait les âmes (fonction départie à Osiris dans le panthéon du Moyen Empire). Conducteur du char du Soleil (comme Apollon), Sûrya-Savitri également symbolisé par le Cheval (Etaça).

En étudiant de plus près les avatars des dieux indiens, nous aurons à montrer comment (et pourquoi) le mythe solaire se survit, dégradé, en la plupart des créations postérieures : Indra, Krishna, les Tantra et le Bouddha lui-même (selon E. Senart). Mais, déjà, nous pouvons noter que cette dégradation paraît liée à une évolution du dieu solaire vers les divinités gémiques.

C’est ainsi que le Mitra indien se caractérise par la lutte qu’il livre contre le dieu nocturne Varuna. Pas plus que le Mithra des Parthes, le dieu védique n’est représenté sous l’aspect d’un lion ; mais, originellement, Mitra s’identifiait à Indra, représenté avec la barbe rousse et les cheveux roux du fauve, dieu du Tonnerre et du Feu, héros d’un très grand nombre de mythes.

Par la suite, sous l’influence de la dualité gémique, Indra aura son ennemi jumeau Vitra, et le couple Indra-Vitra annoncera tous les autres couples divins : Mitra-Varuna, Ormuzd-Ahriman, etc. Vitra (sous le nom de Vithragna) et Ingra se retrouvent aussi dans le panthéon perse, où leur rôle cependant paraît effacé.

En Grèce, la dégénérescence de « l’œil du ciel » a conduit à la création d’un monstre : le cyclope, figure spécialement intéressante, en ce qu’elle réunit deux symboles solaires : le Géant et le Borgne. Or, toutes les légendes celtes d’une part, amérindiennes de l’autre, comportent l’un des deux symboles[1]. Les Chimus enseignaient que leurs ancêtres avaient vécu dans la nuit des cavernes, avant que des Géants « eux-mêmes à demi-aveugles » leur aient appris à voir. D’après la bible des Maya-Quichés, le Popol Vuh, avant l’ère des Gémeaux fut celle de la grand-mère Lune et des Camé (ère cancérique) ; enfin, celle des Géants, dont le chef se nommait Gukup Cakix.

Dans les cycles irlandais, de même, une race de géants préexiste aux peuples successifs de l’Ile. Et, dans la Volüspa nordique, les frères d’Odin, le dieu borgne, sont des géants[2].

Un symbole directement associé à celui du dieu borgne est le cheval blanc (cheval d’Odin, cheval de Sûrya…). Parfois, le cheval lui-même est dieu. « Tu étais alors une queue de cheval, ô Indra ! » s’écrie un hymne du Rig Véda, qui fait allusion à l’époque où le Dieu vainquit le Serpent.

Cette période peut être datée. En effet, la légende d’Uccaecravas, le cheval divin, telle que la raconte l’Astika[3] nous montre la queue de l’animal « noircie » par les serpents qui se sont enroulés dans ses crins. La déesse Vinâta en souffrit cruellement jusqu’à ce que l’oiseau Garûda, son fils, eût vengé l’affront en faisant des serpents sa nourriture (à l’exception du serpent Ananta, « qui soutient la terre ».

Or, la Mère des Serpents, déesse cancérique, se nomme Kadrâ (brun, noirâtre), couleur des terres humides, la Mère des Oiseaux Arûna et Garûda, déesse des Récoltes, se nomme Vinâta (une sorte de panier) et ce nom évoque la cueillette des prémices agraires. C’est encore une fois le conflit entre deux modes d’agriculture (noté à propos de l’Egypte) qui se trouve évoqué ici. En effet, si l’on donne à la religion gémique comme origine le VIIe millénaire (selon le tableau des concordances) et le IXe millénaire (-8800) comme origine à la religion du Cancer, la vengeance de l’oiseau qui anéantit les serpents correspond à la fin de l’ère cancérique et au « royaume » des Gémeaux, soit le VIe millénaire.

Une autre légende, celle des cavaliers Açvins, exprime différemment la même filiation Soleil-Gémeaux, en faisant des Jumeaux indiens les fils de Sûrya, le dieu solaire primitif.

Dans l’astrologie chinoise, le symbole équivalent du Lion est le Cheval. Solaires sont également en Grèce, les chevaux du char d’Apollon, le Pégase de Bellérophon. Puis, une hypothèse défendable serait que le cheval de Troie, création d’Ulysse, l’ennemi du solaire Ajax, correspondît également à une caricature, à un avilissement du dieu.

Certains mythes grecs, entre autres celui des Hippomolgues, rapporte la légende des cavales sauvages fécondées par le vent : rapport ouragan-soleil assez peu fréquent en d’autres pays. Quant au rapport Vierge-Soleil, qu’indique la qualité de Garûda, fils de Vinâta, et d’Horus, fils d’Isis, elle nous est confirmée en plusieurs points du globe. Perséphone, la Vierge Perdue, est emportée par des chevaux blancs du Royaume des Morts au sommet de l’Olympe. Le Dumuzi de Kish et de Syrie était également le fils de la Déesse des Moissons, ainsi que le héros solaire finnois Vaïnamoïnen, fils de la Vierge de l’Air, et Apollon, fils de la Vierge Léto. La disparition de Dumuzi après la chute de Kish daterait de 2900-2800 avant J.-C. l’achèvement de cette première mue solaire, qui aurait pu consister en un syncrétisme Vierge-Lion-Gémeaux.

Effectivement, le très beau mythe hittite de Télépinou, fils du dieu de l’Orage et de la déesse solaire, nous retrace l’histoire de la mort du Dieu et de sa renaissance. « Quand Télépinou eut disparu (de la terre), la bûche s’éteignit dans le foyer, les dieux étouffèrent dans les temples, le petit bétail mourut dans l’enclos, le gros bétail dans l’étable. Il emporta avec lui les récoltes en grains des champs, l’orge et le blé ne mûrirent plus, les arbres se desséchèrent, les sources tarirent… » Alors, le Dieu des dieux envoie à sa recherche le grand aigle, puis le tonnerre ; la Dame des dieux (la Vierge) envoie l’abeille.

Nous ne possédons pas la suite du récit, mais seulement sa fin, où l’on voit Télépinou revenu sur terre[4] et l’on ne sait si le dernier envoyé (l’abeille) est responsable de ce retour. Il reste que les trois symboles : l’aigle, le tonnerre et l’abeille présentent une double particularité. Tous trois solaires, ils « définissent » des mutations distinctes et successives du Mythe initial, qui n’apparaîtra plus désormais que sous ces formes, à de rares exceptions près[5].


[1] D’autres légendes les interprètent. Dans la mythologie japonaise, Amaterasu, déesse du Soleil, naît de l’œil droit du dieu Izanagi (jumeau d’Izanami), tandis que la déesse de la Lune naît de son œil gauche.

[2] Après s’être proclamé « fils de roi » ainsi que ses amis, le héros de GOBINEAU, Wilfrid Nore ajoute : « Que nous soyons également également borgnes de l’œil droit, c’est un fait malheureusement incontestable » (Les Pléïades). La remarque passe inaperçue. Elle n’est cependant pas dénuée d’importance.

[3] 1er Chant : le Mahâ Bhârata, daté du IIIe siècle avant J.-C.

[4] RENE DUSSAUD, opus cité.

[5] En Egypte, ce fut au XIVe siècle avant J.-C. que le pharaon Akhenaton tenta d’instaurer un culte solaire épuré de ses symboles annexes (1372-1354) ; à Rome, sous le principat d’Aurélien, au IIIe siècle de notre ère.

 

L’aigle royal

L’Aigle nous est connu comme le symbole du syncrétisme Soleil-Gémeaux. C’est vers 2400-2300 qu’il apparaît subitement, en Akkadie comme en Elam. Du XXIVe siècle jusqu’au VIIe siècle avant J.-C., Akkadiens, puis Assyriens en décoreront leurs villes et leurs palais (conjointement avec le Lion et le taureau à deux ailes, le Kérubim sacré). Avec le Cheval, autre animal solaire, les Assyriens le transporteront, au terme du « royaume » bélique, jusque dans le Temple de Jérusalem. Et, lorsqu’en 605 l’empire assyrien s’effondre, cette destruction n’entraîne pas la mort du mythe.

Les Perses

En étudiant la mue gémique, nous avons relevé un premier syncrétisme du Lion et des Gémeaux (les Gémeaux y prédominant) dans le panthéon achéen. Un tout autre syncrétisme (le Lion y prédominant) transparaît dans le panthéon perse, issu du panthéon indien et de l’enseignement de Zoroastre. Les Gémeaux y sont figurés par les divinités Ahriman (Ahuro Mainyu) et Ormuzd (Ahura Mazda), dont la lutte sans cesse renouvelée rappelle les démêlés de Seth et d’Osiris. Cependant, la lutte n’est pas égale et l’issue en est connue : la Lumière, Mazda, doit l’emporter un jour sur les ténèbres et l’enseignement de Zoroastre n’a d’autre but que d’amener les hommes à contribuer à ce triomphe.

Il est possible qu’un culte issu de cet enseignement ait été pratiqué dans l’ancienne Médie (VIIe siècle), dont l’alliance avec les Babyloniens devait aboutir à la destruction de l’Assyrie entre 608 et 605 avant J.-C. Mais, en fait, nous ignorons tout des mœurs et des religions des Mèdes, ainsi que de Zoroastre lui-même, sinon qu’il était natif de Médie.

Les doctrines du Prophète ne nous sont connues qu’à travers un premier mazdéisme, dont l’apparition coïncide avec la fulgurante croissance des Perses, à partir de la révolte de Cyrus le Grand contre Astyage, roi des Mèdes (556). Vingt ans plus tard, les satrapes perses dominent sur toute l’Asie occidentale.

L’Empire durera jusqu’aux conquêtes d’Alexandre et à la mort de Darius III (330 avant J.-C.), date à laquelle les religions solaires entreront en sommeil dans le monde entier, pour une durée d’au moins deux siècles.

Les croyances des rois perses — Achémides — étant très controversées, nous voudrions nous en tenir à ce qu’expriment d’une part les textes, d’autre part les sculptures, frises et monuments de l’Empire parvenus jusqu’à nous.

Tout d’abord, les textes témoignent d’une élévation mystique, d’un amour de la Justice et de la Vérité, dont à la même époque on ne trouve d’équivalent que dans la religion hébraïque. « Le Seigneur de Sagesse est vraiment la représentation de la Divinité qui convenait à un spiritualisme plus épuré que celui de notre Ancien Testament, aussi transcendant que celui de Platon[1]. »

Nous avons déjà montré l’influence bélique décelable dans le livre sacré du Mazdéisme, l’Avesta. Ce point nous est confirmé par la Bible même. En effet, le Livre de Daniel nous raconte comment le roi de Babylone, Nabuchodonosor, ayant conquis Jérusalem, exigea que les enfants de la race royale de Juda fussent reçus au Palais, où ils durent étudier les livres « chaldéens ». Daniel était l’un de ces enfants, et l’on peut croire que les chaldéens lui révélèrent les lois du retour éternel et le cycle de la Grande Année.

La mort de Nabuchodonosor survient en 562 ; en 539, la Babylonie tombe aux mains de Cyrus. Entre ces deux dates, doivent être situées les visions de Daniel (que nous ne connaissons que sous une forme apocryphe, postérieure de quatre siècles). La première vision concerne quatre animaux : un lion orné d’ailes d’aigle, un ours, un léopard à deux paires d’aigle et quatre têtes, enfin une grande bête aux dents de fer, au chef orné de dix cornes. La seconde vision, trois ans plus tard, advient au prophète juif alors que, près de Suse, il contemple la province d’Elam « près du fleuve Oulaï » : un bélier à deux cornes combat un jeune bouc unicorne, et l’ange Gabriel explique ainsi la vision : « Le bélier à deux cornes que tu as vu, ce sont les rois de Médie et de Perse, le bouc est le roi de Javan (les royaumes hellénistiques et, particulièrement, le conquérant Alexandre).

On peut déduire de cette explication :

1° que les quatre bêtes de la première vision représentent les empires antérieurs aux dominations de la Perse, puis des Séleucides, sur la Palestine. Dans l’ordre : l’ancien Elam et son lion gémique, l’ours philistin (et scythe), la panthée assyrienne (Ishtar) et le Moloch (Mardouk) babylonien ;

2° que la grande terreur des juifs au IIe siècle avant J.-C., époque où fut écrit le Songe, n’était plus la crainte d’une renaissance des Perses mais d’une renaissance de la puissance séleucide, dont l’un des rois, Antiochos IV, venait de saccager Juda et de prétendre « interdire » Yahvé.

Cette renaissance n’eut pas lieu, alors que l’empire perse allait revivre sous les Parthes, seul adversaire capable de tenir tête aux Césars. Juda s’était trompé d’ennemi : plus que des Séleucides, il aurait à redouter de Rome et, surtout, du dieu des Poissons.

Enfin, la seconde vision de Daniel témoigne de l’extrême sympathie que les nouveaux juifs portaient aux chefs des Achémides. Cette sympathie ne peut surprendre lorsqu’on sait que Darius autorisa la reconstruction du Temple de Jérusalem[2], lorsque l’histoire biblique d’Esther lie le destin de Juda à celui de la Perse, lorsque les grands réformateurs Esdras et Néhémie partagent leur existence entre la ville de Jérusalem et la cour des Achémides et lorsque ces derniers sont proclamés par les Prophètes les « bénis du Seigneur ».

Mais si le Dieu des dieux à Persépolis est le Seigneur de Sagesse, de Justice et de Tolérance, il est aussi Mazda, le dieu-lumière. La divinité du Roi (telle qu’elle apparaît entre autres dans l’histoire d’Ahiqar, texte perse d’origine assyrienne) atteste le caractère royal du culte, conforme à l’esprit du Signe solaire ; et l’Aigle et le Lion ne cessent pas, tout le temps que dure le royaume perse, d’orner les portiques des palais et de constituer le motif principal des frises de pierre[3]. Enfin, le Cheval, importé d’Assyrie, allait devenir en Perse un symbole sacré en même temps qu’un recours technique non négligeable : leur cavalerie compterait pour beaucoup dans la puissance militaire des Achémides[4].


[1] RENE GROUSSET, Les Civilisations d’Orient, Ier volume, Editions Crés et Cie, 1929.

[2] Livre d’Esdras, V.

[3] Voir au Musée du Louvre un certain nombre de ces frises.

[4] Je ne discuterai pas ici de la question de savoir si l’animal est devenu sacré parce qu’il était utile, ou si plutôt on ne l’a pas utilisé, d’abord, par une sorte de confiance mystique dans le dieu qu’il symbolisait. Deux écrivains que j’admire beaucoup l’un et l’autre semblent avoir sur ce problème des vues diamétralement opposées. MIRCEA ELIADE écrit : « Si l’histoire a fait peser son influence sur l’expérience religieuse, c’est en ce sens que les évènements ont offert à l’homme des modes inédits et différents d’être, de se découvrir lui-même et de donner une valeur magico-religieuse à l’Univers » (Traité d’Histoire des Religions). Au contraire OSWALD SPENGLER, dans Le déclin de l’Occident, ne cesse de démontrer que les mythes préexistent aux cultures et les nourrissent de leur apport, aussi longtemps que la Culture ne s’est pas dévoyée en civilisation.

 

Le tonnerre hittite

Les rites initiatiques (australiens et africains) qui utilisent le « bull-roarer » nous ont prouvé la survivance jusqu’à nos jours d’un syncrétisme tonnerre-taureau, dont l’archéologie retrouve l’origine à Tell-Ubaid et à Tell-Halaf, dans la période d’éveil du mythe taurique (Ve millénaire).

Or, les dieux hittites de l’orage dont il s’agit dans la légende de Télépinou ont tous un caractère taurique nettement défini. Le plus grand d’entre eux est toujours accompagné par deux Taureaux, Seri et Hourri, qu’on reconnaît dans l’attelage du « dieu de l’orage » de Malatya. D’autre part, des divinités typiquement tauriques comme Hadad étaient assimilées par les Hittites au dieu de l’orage et de la foudre, ainsi que le dieu hittite Teshoub, représenté par l’idéogramme ISKUR, comme le dieu de Malatya. Hadad s’exprime dans le tonnerre, il lance l’éclair et dispense la pluie. Les symboles de Teshoub (ou Teshup) sont le foudre, la double hache et la massue.

C’est en partie sous cet aspect à demi taurique à demi solaire qu’apparaît le Zeus crétois et mycénien. Incontestable dieu-soleil, il manie le foudre, il s’identifie au Taureau (pour enlever Europe) et porte le nom de « grand bovin ».

De même, s’apparentent à ce syncrétisme les dieux indiens et iraniens, à travers les figures qu’en donnent les Védas et le mithraïsme des premiers siècles. La caractéristique essentielle en est que le Taureau ne s’y révèle plus « fécondateur », comme dans le mythe sumérien, mais « créateur ». Ainsi, chez les Iraniens, du corps du taureau primordial tué par Ahriman naissent des céréales et des plantes. Avec ce caractère, le dieu du tonnerre et de la foudre est très souvent le principal mythe solaire devenu, par dégradation, un mythe taurique. Ainsi de Krishna en Inde, de Mithra en Iran, des Zeus nabatéens, ou des thèmes ambigus dont on retrouve la trace dans les cycles irlandais.

Pour rendre plus claire cette évolution du syncrétisme Lion-Gémeaux au syncrétisme Lion-Taureau, il est nécessaire de dire quelques mots du mythe du Roi.

Le Roi

Ce sera seulement au cours du Ier millénaire avant J.-C. que le Signe solaire prendra un caractère nettement « royal », alors que sa constellation deviendra la Constellation du Roi, et son étoile principale Regulus ou « Cor Leonis stella regia » ; mais, dès 2300-2200 avant J.-C., le rapport Lion-Roi avait été comme souligné par la brusque importance du concept de royauté dans les civilisations léonines. C’est l’époque où toutes les villes d’Elam et d’Akkadie possèdent leur propre souverain et où les premières tribus sémitiques du pays de Canaan se fondent sur leur exemple. Cependant, il semble que le Mythe lui-même ait été antérieur à cette « socialisation ».

Dans esquisse du « royaume » gémique, Platon fait une part importante aux chevaux (symbole solaire), considérés à la fois comme doués de pouvoirs particuliers et comme objets de soins quasi religieux des Atlantes. La légende platonicienne établit ainsi un rapport étroit entre le Signe solaire et la notion de royauté[1].

Datés des premiers siècles après J.-C.[2], les Purâna indiens racontent longuement, en les replaçant dans leur chronologie mythique, la consécration et le règne de Prthu. Roi nourricier, Prthu dompte la vache-terre, à laquelle s’alimenteront tous les grands thèmes survivants (les Manes, les Serpents, les Arbres). Cet épisode de Prthu poursuivant la vache-terre correspond trop évidemment à la légende achéenne de Zeus-Taureau poursuivant Europe : il doit remonter à la même époque, soit au IIe millénaire avant J.-C.

Analysant le mythe de Prthu, Georges Dumézil dit étrangement que « dans la perspective de l’Histoire, ce Roi a vécu une ère avant Manu Vaivasvata, lequel reste l’ancêtre incontesté de la société arya de l’ère en cours[3] ».

Cependant : 1° c’est de Prthu que vient le nom de la fonction royale contemporaine (râjan) ; 2° les Védas, où figure déjà le nom : Manu, sont nettement antérieurs aux Purâna ; 3° la légende rapporte expressément que Prthu naît du bras droit de Manu. Il semble donc plus probable que Prthu fut, par rapport à Manu, une émanation postérieure (contemporaine de la seconde mue solaire). D’ailleurs, G. Dumézil lui-même se contredit lorsque, comparant Prthu au roi romain Servius, il note que Tarquin et Servius « s’opposent à leurs prédécesseurs comme Prthu à Manu [4] ».

On doit penser que ce passage du thème légendaire à sa réalisation sociale caractérise le passage (crépusculaire, puis auroral) de la première à la seconde mue du Mythe. Ainsi avons-nous vu le thème légendaire des Cinq Empereurs (= Palais = Eres) s’incarner dans les faits à partir du Premier Empereur de Chine (Houang-Ti) et du premier Auguste romain. Ainsi voyons-nous le thème abstrait et théorique de la Res Publica (fin de la première mue gémique) s’incarner, dès l’aurore de la seconde mue (XVIIIe siècle) dans les hommes et les faits : Révolution française, Démocratie américaine, Marxisme. Ce serait donc entre la fin de la première mue du Lion (2850) et le début de sa seconde mue (2350) que le Roi légendaire (et solaire) Manu se serait incarné dans le roi réel (et taurique) Prthu.

Effectivement, des différents ouvrages que G. Dumézil consacre à l’évolution de la notion de royauté, il ressort que le Dieu-Roi, tout d’abord considéré comme une simple entité (Mitra, Manu dans le Rig-Véda, Vohu-Manah, Asu dans le zoroastrisme) évolue en Roi nourricier (Aryaman, Phru en Inde, Eremon chez les Celtes irlandais), puis en Roi juste et qui préside à la répartition des biens entre les citoyens (Bhaga dans l’Inde, Servius à Rome). La notion de « consentement public » accompagne cette dernière évolution[5].

Or, le premier état de roi-entité se caractérise par le conflit gémique « lumière-ténèbres » : Horus-Seth, Ormuzd-Ahriman, Mitra-Varuna ; le second état, par l’intervention du Taureau, de la Vache ou du Bœuf[6] ; le troisième, par le recours aux grands thèmes béliques : Flamines à Rome, Agni en Inde, ainsi qu’au Mythe de l’Abeille.


[1] PLATON, l’Atlantide dans le Critias.

[2] Certains d’entre eux ne furent cependant rédigés qu’aux XIIe et XIIIe siècles.

[3] Georges DUMEZIL, Servius et la Fortune, P.34 (Gallimard).

[4] Servius et la Fortune, p.168.

[5] Les dieux des Indo-Européens, Les dieux des Germains (Presses Universitaires). — G. DUMEZIL fait remarquer que les « rois par consentement » ont souvent, comme la Fortune, un bandeau sur les yeux ; ils sont même aveugles (Bhaga) ou borgnes (Coclés, Odin, Wotan). Mais l’exemple de Ré, ainsi que les premiers dieux solaires indiens, autorise à douter de cette interprétation : le Borgne est un symbole contemporain du Mythe solaire le plus archaïque, antérieur même à la notion de « royauté ». Alors que le mythe du Roi semble une émanation de l’alliance Lion-Gémeaux, on peut penser que le Borgne est une dépréciation de »s mythes syncrétiques Soleil + Balance + Serpent (l’Œil du Ciel, la Roue, le Cercle et la Couronne), qui durent naître au début de la première mue du Lion.

[6] Voir, plus loin, l’étude des mythes celtiques.

L’Abeille

Initialement solaire, l’abeille était l’emblème d’Horus dans l’Egypte des deux royaumes. Champollion déclare à ce sujet que « l’insecte était choisi pour symbole de la royauté, parce qu’il est lui-même soumis à un gouvernement régulier[1] », et l’historien Horapollon atteste qu’un peuple obéissant à son roi est figuré par cet emblème.

Très vite, néanmoins, l’Abeille connut un déclin singulier. L’un des premiers indices en est l’histoire de Samson, où le plus solaire des héros béliques découvre du miel et des abeilles dans le cadavre du lion qu’il avait lui-même tué. « Ainsi, dit-il, le plus doux est né du plus fort ! »

Chassang semble avoir été le premier auteur contemporain à établir un rapport entre l’abeille et le peuple hébreu. Du moins donne-t-il au surnom de Zeus, « Essen », une origine sémitique ; Creuzer précise qu’Essen voulait dire primitivement « roi des abeilles » et n’en est venu que tardivement à signifier le Roi[2]. C’est également l’avis de Gustav Hoelscher, qui fait remonter le symbole hébraïque de l’Abeille au temps des premiers Juges : antérieurement aux Rois, les Hébreux offraient déjà des libations d’huile et de miel, en l’honneur de Déborah, « reine des abeilles ». Le lieu de cette cérémonie se nommait l’Arbre des Pleurs et se situait près de Bethel[3].

Au lendemain de « ce temps-là » bouddhique et chrétien, les Empires (germanique, espagnol, chinois) n’auront plus avec les anciens Empires (de Rome ou de Houang-ti) en commun que le nom. De même, au lendemain de « ce temps-là » bélique, les Royaumes (perses, romains, hellénistiques, etc.) n’ont plus en commun que le nom avec les Royaumes antérieurs (indiens, élamites, mycéniens…). Le créateur, le fondateur est devenu le « berger des peuples » dont parle Philon d’Alexandrie[4] ; le Thespésios de Plutarque, régénéré, ressuscité au terme d’une mort de trois jours, « plus juste, plus saint, plus ferme dans ses amitiés ».

Ce passage du roi fondateur et guerrier au roi juste est inscrit dans la Bible. Lorsque les anciens d’Israël vinrent prier Samuel de leur donner un roi : « Voulez-vous donc quelqu’un qui vous impose, vous rançonne et vous pille ? » leur demanda-t-il. « Non, répondirent-ils, mais quelqu’un qui nous jugera ![5] »

Ainsi, le roi hébreu eut la charge des troupeaux, le devoir de faire justice et de régler les partages.

Nous avons précisé le caractère ignicole des prêtres du Bélier (autre Signe de Feu), qu’ils fussent hétéens, amorites, hébraïques. Il ne saurait donc étonner que le premier caractère des syncrétismes Lion-Bélier (postérieurs à 800 avant J.-C.) fût précisément un retour au mythe solaire primitif du Feu, hautement spiritualisé par le nouvel idéal bélique. Comme le dieu d’Israël, le roi juste est terrible ; car toute justice appelle le châtiment, la colère du « juge inspiré » sur le coupable.

Mircéa Eliade cite un grand nombre de faits qui témoignent de la survivance chez les Indiens et les peuples de l’Asie Centrale de la croyance en un « délire brûlant » : initiation secrète, colère sacrée, maîtrise d’un « feu intérieur », etc. Eliade cite également la légende roumaine de Românas qui, vainqueur de seize mille Tatars, demeure troublé à tel point par la « chaleur sacrée » qu’il redoute de poursuivre le massacre parmi les siens[6]. Cette fureur est à rapprocher, d’une part, du délire d’Ajax, le héros solaire, massacrant ses propres alliés, les guerriers d’Ulysse, d’autre part de la colère de Cuchulainn, auquel des bains glacés sont nécessaires pour reconquérir son sang-froid[7].

G. Dumézil a retrouvé le thème de l’échauffement du héros dans la légende de Badradz chez les Ossètes[8]. Tite-Live raconte que du front de Marcius sortaient des flammes qui terrifiaient ses soldats[9] et M. Eliade note justement que les images littéraires qui définissent ou représentent la furor (yeux brûlants, cheveux hérissés…) sont devenus presque des clichés dans la poésie latine[10]. Or, les Romains, les Grecs, les Ossètes et les Celtes, les Indiens, les Roumains adorent précisément des dieux à demi solaires, à demi béliques ; et, ce syncrétisme, presque partout l’emblème nouveau le symbolise.

A Ephèse, les prêtres de Diane-Artémis se nomment eux-mêmes les Essines et se comparent aux abeilles de leur déesse, dont une effigie orne les médailles de la cité. Dans Euripide, Iphigénie, prêtresse d’Artémis, et Œdipe font de même des libations de miel, l’une à Pluton, l’autre aux Euménides. A Delphes, la Pythonisse d’Apollon, dieu solaire, était appelée l’Abeille. La légende de Glaucus (fils de Minos, comme le Bélier l’est du Taureau) rapporte que, tombé dans une cuve, le jeune prince avait ressuscité en buvant le miel qui l’étouffait ; et l’on sait assez que la boisson sacrée, l’hydromel des dieux, n’était autre qu’une liqueur de miel.

En Inde, c’est sous l’influence des Brahmes que le Soma, autre boisson sacrée, fut associé au culte d’Agni. Or, le singe Dadhimuka (bouche de beurre) qui garde « les forêts de miel » était le fils de Soma, considéré comme un dieu[11]. L’image de la « forêt » ou du « fleuve » de miel se retrouvera dans tous les cultes et légendes directement inspirés du Bélier : le delphisme primitif, le mythe indien de la Ganga, le mosaïsme[12]

Dans les siècles qui suivirent, les juifs eux-mêmes durent se défendre contre le symbole envahissant. Ils interdirent les libations de miel, sous le prétexte que l’abeille « est un animal immonde, engendré, à ce qu’on assure, du cadavre du bœuf en putréfaction[13] » ; mais, en fait, parce qu’ils ne pouvaient pas admettre un culte à demi bélique, à demi solaire. Pour une raison différente (ils avaient choisi le syncrétisme de l’Aigle), les Romains se défiaient des abeilles. Plutarque et Tite-Live rapportent qu’il était regardé comme un mauvais présage que des abeilles se posent sur la tente du général en chef, sur le pont d’un navire et, particulièrement, sur les enseignes des aigles[14].

Cependant, la légende de l’abeille naissant du cadavre du bœuf (comme le Bélier du Taureau) survit à Rome ainsi qu’en Judée, et l’on voit Virgile consacrer à ce mythe une partie importante de la IVe Géorgique : le taureau (de deux ans) doit être sacrifié au printemps, puis étendu sur un lit de feuillage, de thym et d’herbe fraîche (vestige gémique) dans un local percé de quatre fenêtres tournées aux quatre vents, afin de recevoir les effluves du cosmos entier. Tout étant ainsi préparé, les abeilles (la parole de Dieu) naîtront d’elles-mêmes dans le corps du taureau (et dans l’esprit du nouvel initié[15]).

Légende tenace : sur le tombeau de Chilpéric, roi franc, trois cents abeilles tournoyaient autour d’une tête de taureau[16]. Ce détail nous introduit aux légendes celtiques.


[1] CHAMPOLLION, Grammaire égyptienne.

[2] CREUZER, Symboles. Eleusis et les traditions.

[3] GUSTAV HOESCLER, Die Profeten, Untersuchung zur Religions Geschichte Israels, Leipzig, 1914.

[4] PHILON D’ALEXANDRIE, Vie de Moïse, I, II.

[5] Ier Livre de Samuel, VIII.

[6] Mircéa ELIADE : Naissances mystiques, Gallimard.

[7] Le Tâin Bô Cuâlng (traduit par D’Arbois de Jubanville).

[8] G. DUMEZIL : Horace et les Curiaces, Gallimard.

[9] TITE-LIVE, XXV, 39, 12.

[10] Ces images également figurent ou symbolisent l’inspiration lyrique et prophétique (en Israël, à Delphes et chez les Ases nordiques).

[11] En Chine, de même le Singe était le symbole équivalent de notre Bélier.

[12] LEVI-STRAUSS étudie actuellement un passage analogue des mythes solaires aux mythes de l’Abeille et du Miel en Amérique du Sud (cours non publié).

[13] PHILON, De ceux qui offrent des victimes en sacrifice.

[14] TITE-LIVE, Histoire romaine, XXI, 46 ; PLUTARQUE, Dion, XXVI ; Brutus, XLIIV, LVI.

[15] VIRGILE, Géorgiques, IV, vers 294 et suivants.

[16] Le myhe bélique et l’emblème demeureront longtemps associés. Restaurateur du Sanhédrin, Napoléon fera broder des abeilles sur son manteau impérial et en décorera ses appartements. Cela aussi, Nostradamus l’avait prévu, dans un quatrain curieusement écrit en langue romane (alors que les Centuries sont en français) :

« Lou grand eyssame le levera d’albehelos

Que non sauram donte sigem venguddos » (IV, 26).

(Un grand essaim d’abeilles se lèvera et l’on ne comprendra pas le sens caché de ce réveil).

 

La « grande année » des Celtes

En effet, les trois étapes de la « mue solaire » des IIe et Ier millénaires avant J.-C., décelables dans l’histoire de l’Elam puis de la Perse et résumées en trois symboles dans la légende hittite, sont au contraire longuement, copieusement développées dans les cycles celtiques et, particulièrement, les mythes irlandais.

Une des œuvres les plus importantes de cette littérature me semble être le Lebor Gabâla ou Livre des Conquêtes, qu’on suppose écrit vers le IXe siècle de notre ère à partir d’un fond nettement antérieur. Le poème retrace l’histoire de six peuples distincts qui se seraient succédé sur la terre irlandaise.

Le premier, antérieur au déluge, aurait disparu avec lui ; le second, dont le chef s’appelait Partholon, aurait été une race de défricheurs et de laboureurs ; il disparut subitement lors d’une fête de Mai. Le troisième, les Nemed, ne subsiste que peu de temps ; le quatrième, les Fir Bolg (ancêtres des Belges ?) et les Fir Domnainn (ancêtres des Domnonéens de Grande-Bretagne ?), apporte dans le pays l’usage du fer de lance et l’institution d’une royauté liée à la fécondité du sol. Cette race est vaincue par un cinquième envahisseur, les Tuatha de Danann, qui adorent la déesse Anu et détiennent des secrets magiques : le chaudron de Dayda, dieu bâtisseur, l’Epée de Niada, dieu-roi (lié à la fertilité). La sixième race, les fils de Mil, était celle dans laquelle le peuple gaëlique reconnaissait ses ancêtres directs : ses héros, Eremon, Amairgin le poète et surtout Cuchulainn ne cesseront de combattre le peuple-fée des Tuatha ainsi que les Fomoré, voisins sanguinaires et cruels, que ni Partholon, ni les Nemed, ni les Fir Bolg, ni les Tuatha n’avaient encore pu vaincre.

Cette longue légende retrace au minimum cinq millénaires d’Histoire si l’on en croit la mention du « déluge ». On y reconnaît des magiciens gémiques (mutants d’un syncrétisme Gémeaux-Vierge), les Tuatha ; des régalistes (mutants d’un syncrétisme Lion-Gémeaux), les Domnainn ; des défricheurs, dont le culte de Mai dénonce l’appartenance gémique, le peuple de Partholon.

Si l’on applique ici le tableau des concordances, on peut avancer (prudemment) que ce dernier peuple dut apparaître en Irlande vers le IVe millénaire et s’y maintenir jusqu’au milieu du IIIe. Les Domnainn représenteraient une première invasion indo-européenne vers 2400-2300 et se seraient maintenus dans l’île jusqu’à l’arrivée des envahisseurs tuatha (frères des Hittites ?). La domination des fils de Mil, les Milésiens (venus de Grèce ?), se situerait enfin au cours du Ier millénaire avant J.-C. et se serait maintenue très avant dans notre ère. La tradition veut en effet qu’un de leurs héros, Conchobar, soit né la même nuit que le Christ.

Quant aux Fomoré, dont l’empire aurait alors duré du milieu du IVe millénaire jusqu’au premier siècle avant J.-C., il faudrait voir en eux un peuple taurique. Le Lebor Gabâla confirme cette hypothèse, quand il indique que cette race honorait par des sacrifices bovins sa fête de novembre (Samhain). La Tain Bô Cuâlng, autre poème celtique, la confirme également par le récit de la grave querelle qui oppose les souverains tuatha, Ailill et Medb, à Conchobar, roi d’Ulster, l’oncle de Cuchulainn[1]. Conquis, le Taureau Brun s’évade et enlève Corne Blanche ; il revient de lui-même en Ulster, où il arrive pour mourir, le cœur éclaté.



[1] D’ARBOIS DE JUBAINVILLE, traduction du Tain Bô Cuâlng, Paris, Champion, 1907.

 

Le crépuscule du dieu

Un brusque crépuscule du dieu solaire à partir du IVe siècle avant J.-C. nous a été indiqué : 1° par le rejet de l’Aigle à Rome (vers 360) et de l’Empereur Rouge en Chine (368), 2° par l’anéantissement de l’empire perse et la domination macédonienne sur la Grèce et l’Egypte. Une émouvante confirmation de la disparition du dieu serait le périple des Celtes depuis leur île lointaine jusqu’au temple de Delphes (277).

Brennus et ses guerriers casqués de corbeaux de bronze, « guidés par des oiseaux », ne venaient pas pour piller — et ils ne pillèrent pas. Mais ils venaient quérir au lieu même du sanctuaire la certitude que le fils de leur Vierge hyperboréenne Léto était vivant ou mort[1]. L’éclat de rire du grand chef celte devant les représentations trop humaines d’Apollon est à rapprocher, ainsi, du geste désespéré du « dernier Séminole » jetant aux pieds de ses vainqueurs l’idole du Serpent crépusculaire (1862).

Désormais, ce sera dans une alliance nouvelle (Gémeaux-Taureau) que les Celtes des IIIe et IIe siècles avant J.-C. chercheront la patience d’attendre la dernière aurore d’Apollon (ainsi, depuis leur écrasement, les Indiens des Réserves se réfugient dans ces églises « nouvelles », à demi hébraïques, à demi chrétiennes : « Native Church », etc.).

En Gaule même, l’acceptation tardive (et provisoire) d’un dieu Taureau par les Bretons a laissé de nombreuses traces. Paimboeuf (Loire-Atlantique) signifie « la pointe aux bœufs ». Dans sa Géographie, Strabon parle d’une île de Basse-Loire, où des femmes barbares célébraient le culte de Dionysos[2]. En Irlande également : dans le Dindsenchas, le lait de vache guérit des blessures empoisonnées.

Nous sommes tout à la fin de la religion taurique (première période). En effet, le Dindsenchas relate d’autre part l’histoire du roi Bress, qui fut victime d’un subterfuge de ses vassaux, les Munstériens. Contraints de lui remettre en tribut un troupeau de trois cents vaches, ceux-ci avaient fabriqué pour figurer le bétail trois cents mannequins de bois aux pis fictifs enduits de tourbe noire. Ayant bu avidement de cette tourbe, Bress en mourut six ans six mois et six jours plus tard (666). On se rappellera que, de même, aux derniers siècles du Taureau, le sang de l’animal empoisonnait le phrygien Midas, le perse Tanyoxartès, l’égyptien Psaménite. Ici, cependant, l’affabulation est grotesque et l’intention parodique : le drame fait place à la farce, preuve que le dieu Taureau n’existe plus[3].

Dumézil établit un intéressant parallèle entre ces anecdotes et les rapports existant entre le Servius romains ou le Prthu indien et le mythe de la Vache[4]. Je m’étonne qu’il n’ait pas poussé plus loin sa démonstration, jusqu’à faire apparaître l’existence en Inde, en Perse, en Scandinavie et même à Rome, d’un conflit unique et durable entre, d’une part, les Mythes tauriques et cancériques (Çiva, Prthu, Ahriman, Eremon, Servius, les Pierres levées ou le Minotaure) et, d’autre part, les Mythes gémiques et solaires (Manu, Indra, Ormuzd, les Domnainn et les Tuatha, les Dioscures, Odin-Wotan, etc.). Les deux mouvements ne furent-ils pas des syncrétismes simultanés en un moment de leurs évolutions (première mue du Cancer : 3700-700, deuxième mue du Lion : 2350-350) et qui, nécessairement, s’affrontèrent ?

Comme l’Avesta perse, les grands poèmes celtiques, en décrivant les luttes des peuples successifs de l’Irlande contre les Fomoré, nous représenteraient donc le combat (sur deux millénaires) que les civilisations gémiques et solaires eurent à livrer contre le dieu Taureau, tantôt le refusant, tantôt l’acceptant, avant de le vaincre enfin au premier siècle avant J.-C. (dernière mue solaire, crépuscule taurique).

Des cycles irlandais postérieurs retracent de manière plus confuse le périple zodiacal (syncrétisme successif) des Celtes. Imprégné de références odysséennes, le Voyage de Maelduin nous fait retrouver des oiseaux de mer (symbole gémique), un chat gardien de trésors (symbole cancérique), les trois pommes miraculeuses des Hespérides (symbole virginal), la bête du vent (symbole ouranien) et des sangliers rouges[5] ; Dans le texte Baile in sceail, la reine-fée d’Irlande offre au roi Conn une côte de bœuf apparemment dotée de pouvoirs particuliers.

Mais la plupart de ces récits, composés vers le XIIe siècle, ont subi fortement l’influence chrétienne et les traces des anciens mythes ne s’y révèlent plus clairement.



[1] Voir l’article de JEAN MARKALE sur « la prise de Delphes » dans Les Cahiers du Sud (N° 370).

[2] STABON, Géographie, V, 6.

[3] WHITLEY STOKES, The Rennes Dindsenchas, Revue Celtique, XV, 1894.

[4] GEORGES DUMEZIL, Servius et la Fortune, Gallimard, 1943.

[5] Dans l’hindouisme, le Sanglier est le symbole de la Balance.

 

La Suède et l’Allemagne

On doit faire la même remarque en ce qui concerne les littératures gaëlique, écossaise et galloise. En revanche, un autre bel exemple de syncrétisme Soleil-Gémeaux nous est donné par le dieu scandinave et germain Odin.

Divinité agraire, le dernier épi du champ lui était consacré, tandis que deux corbeaux, ses symboles (Huan la Pensée et Munin la Mémoire) témoignaient de son caractère gémique. Mais également, le dieu détenait son pouvoir de son oncle Nimir et l’avait payé d’un de ses yeux ; en sorte qu’Odin n’avait qu’un œil (comme le Cyclope, Horus et Sûrya). Sous cet aspect solaire, il manie le foudre ; il chevauche un coursier blanc, comme son équivalent Wotan. Historiquement, on assimile ce Wotan-Odin à un grand chef barbare du Don, qui aurait dirigé une émigration celte à travers la Russie vers les pays du Nord, au Ier siècle avant J.-C. ; on voit en lui le fondateur d’Upsal.

La saga de Volüpsa, mythologie occulte du dieu scandinave, relate la guerre sans merci que dut livrer Odin contre les « puissances » zodiacales qui lui étaient contraires, au premier rang desquelles le Serpent (Midgard ou Niddhögg) et le Géant Loki, frère de lait du dieu (en qui l’on peut voir un héros gémique), tantôt allié, tantôt ennemi d’Odin[1]. Loki meurt d’une mort éternelle, horrible, le Serpent répandant sur son visage retourné du venin, que l’épouse du héros, Sigyn, recueille au fur et à mesure dans une cuvette. Vaincu à son tour et emprisonné, le Serpent un jour sera libéré ; il ébranlera le monde ; alors, Loki s’échappera et les légions de Surt, le dieu de l’abîme, se mettront en marche pour détruire les dieux. Mais, dans un très lointain avenir, ils renaîtront et le royaume d’Odin rayonnera de nouveau.

Tous les dieux germaniques, de même, se laisseraient rattacher sans difficulté au culte solaire : Heimdall, Balder (fils d’Odin) sont des héros de lumière ; Freyr (dieu primitivement suédois) possède un cheval magique. Tous doivent combattre des géants. Enfin, pas plus que les Scandinaves, les Germains ne croyaient à l’immortalité des dieux, mais seulement à leurs renaissances sans fin, après de plus ou moins longues périodes de défaite et d’absence.

L’œuvre la plus célèbre de l’Allemagne médiévale, les Nibelungen, me semble raconter sous les voiles du symbole l’enchaînement des signes et des dieux du Cosmos dans un rythme assez comparable à celui des légendes irlandaises. Les combats de Siegfried contre le dragon, son vol du filet magique qui lui permet, invisible, de se faire le « double » du roi, sa lutte contre l’amazone vierge Brunehilde (où beaucoup voient la déesse-reine Anu des Tuatha de Danann) sont les étapes symboliques de la lutte que doit livrer le Mythe solaire contre les mythes et cultes des religions mutantes du Cancer, des Gémeaux et contre la nostalgie de la Vierge, avant de triompher — une dernière fois — à l’aube de l’ère chrétienne[2].

Tous ces récits, nés au cœur de la chrétienté, attestent la volonté du Celte de défendre ses mythes et ses légendes contre l’emprise croissante du Christ[3]. Ils témoignent de la vitalité, de la survivance jusqu’à l’an 1000 après J.-C. des mythes solaires et léonins. C’est donc cette survie, cette dernière mue du Lion, qu’il nous faut maintenant étudier.

 



[1] C’est toujours le combat d’Ormuzd contre Ahriman, d’Osiris contre Seth…

[2] Je ne me cache pas que l’étude immense des dieux celtiques reste en grande partie à faire ; mais il semble improbable que des ouvrages futurs puissent contredire l’évolution que j’esquisse ici. J’en donnerai pour preuve un livre qui vient de paraître et qui traite du problème mal connu des divinités suisses. De Lug, l’ancien dieu celte, à Castor et Pollux et de ceux-ci à la vache nourricière, leur évolution suit le même rythme qu’en Irlande et en Scandinavie (CHRISTINGER et BORGEAUD, Mythologie de la Suisse ancienne, Librairie de l’Université, Genève).

[3] Au prix, parfois, de très étranges subterfuges. Le Dragon que combat Siegfried se nomme Fafnir ; or, Fafnir aurait été un saint ermite des IVe ou Ve siècles… A l’inverse, sous le nom de Saint Cornély, on reconnaît aujourd’hui un ancien mythe celtique, contemporain du syncrétisme Soleil-Taureau. En effet, selon la légende, Cornély, pape (de 251 à 253) s’enfuit de Rome accompagné de bœufs qui portaient son bagage et le portaient lui-même. On l’aurait enterré dans la montagne Saint-Michel, où une chapelle lui est dédiée… Le tumulus de Saint-Michel vient de livrer son secret : des ossements d’un homme et de plusieurs bœufs — ils ont 5 000 ans d’âge ! (Selon AIME MICHEL, La plus vieille religion d’Europe ? dans la revue Planète, N°9).

 

Jean-Charles Pichon 1963

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